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Réchauffement climatique
: déjà trop tard ?
Les climatologues sont très inquiets... et nous devrions l’être
aussi! Un compte rendu fidèle des dernières avancées
de la recherche sur le réchauffement climatique, publiées
dans les très sérieuses revues scientifiques Nature et Science.
Figure 1
Source: Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution
du climat (GIEC), 2001
Le 7 juin 2005, les Académies des sciences des pays du G8, de Chine,
d’Inde et du Brésil ont solennellement publié une
déclaration commune[1] sur le réchauffement climatique dans
laquelle elles nous préviennent qu’un important réchauffement
climatique de la planète est en cours et qu’il est provoqué
par les activités humaines. Dans cette déclaration, les
Académies des sciences affirment que ce réchauffement constitue
une grave menace pour l’humanité et pressent les gouvernements
de prendre d’urgence des mesures d’envergure pour réduire
de manière substantielle les émissions de gaz à effet
de serre.
Pourquoi onze Académies des sciences ont-elles publié une
telle déclaration commune?
La réponse, hélas, est à la fois simple et grave:
les avertissements répétés de la communauté
scientifique sur l’extrême gravité du réchauffement
climatique ne sont jusqu’à présent parvenus jusqu’à
l’opinion publique que sous une forme atténuée et
déformée par les médias et les lobbies pétroliers.
Or la menace se précise et le temps presse...
Certes, tout le monde a entendu parler du réchauffement climatique.
Même Hollywood s’en est emparé, le transformant malencontreusement
au passage en refroidissement climatique. Mais ce qu’il est important
de savoir, c’est que les climatologues sont furieux de la manière
dont les médias ont couvert le sujet depuis une quinzaine d’années[2].
Et ils ont de bonnes raisons de l’être. En effet, plusieurs
études scientifiques[3] ont démontré que depuis 1988,
la presse, notamment américaine, a systématiquement biaisé
la couverture médiatique en faveur de détracteurs du réchauffement
climatique en leur accordant une couverture disproportionnée, créant
ainsi une grande confusion dans l’opinion publique. La même
constatation s’applique aux médias de l’audio-visuel.
À la source de cette désinformation maintenant bien documentée[4],
on trouve de puissants lobbies pétroliers, menés par le
groupe ExxonMobil (propriétaire des marques Esso et Mobil), qui
ont mis en oeuvre des moyens financiers considérables pour désinformer
les médias sur le réchauffement climatique et pour s’opposer
au Protocole de Kyoto. Leur technique: mettre constamment à disposition
des journalistes les 2% de climatologues subventionnés par ExxonMobil
qui doutent de l’origine anthropique du réchauffement climatique.
Leur objectif: obtenir une couverture médiatique grand public supérieure
à celle des 98% de climatologues sérieux et indépendants.
Cet objectif a malheureusement été atteint, donnant ainsi
l’impression au public que les scientifiques étaient divisés
sur la réalité du réchauffement climatique, alors
que ce n’était pas du tout le cas!
Cette désinformation réussie a ainsi produit un décalage
saisissant entre, d’un côté, la communauté scientifique
qui s’alarme de plus en plus des conséquences du réchauffement
climatique et surtout du risque d’emballement irréversible
du climat et, de l’autre côté, une opinion publique
qui doute encore de la réalité du phénomène
et ignore presque tout de ses conséquences.
L’année 2005, heureusement, pourrait enfin avoir marqué
le début d’une prise de conscience de l’opinion publique,
notamment aux États-Unis. Les ouragans à répétition
et la terrible catastrophe de La Nouvelle-Orléans y sont sans doute
pour quelque chose. Les médias commencent enfin à prendre
le réchauffement climatique plus au sérieux, mais semblent
toujours aussi incapables de rendre compte du phénomène
dans sa globalité et surtout de prendre la mesure de ses conséquences
proprement cataclysmiques à long terme.
Et pourtant, le réchauffement climatique et ses conséquences
peuvent être expliqués clairement.
L’ÉTAT DES CONNAISSANCES SCIENTIFIQUES
Depuis le début de l’ère industrielle, en brûlant
des énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz naturel)
l’humanité a relâché d’énormes
quantités de CO2 (dioxyde de carbone) dans l’atmosphère,
faisant passer sa concentration de 250 ppm à 379 ppm (ppm signifie
parties par million, autrement dit 10.000 ppm = 1%), soit une augmentation
de 50 % (cf. figure 1) et une concentration jamais atteinte depuis au
moins 420 000 ans, probablement même depuis la fin du Paléocène,
il y a 55 millions d’années[5]. Or ce gaz est l’un
des principaux contributeurs de l’effet de serre qui réchauffe
notre planète. Jusqu’à présent, l’élévation
de température a été minime, de l’ordre de
0,8 °C, parce que les océans ont absorbé la moitié
du CO2 émis et parce que leur inertie thermique a freiné
le réchauffement.
Les choses, hélas, sont en train de changer. Le CO2 relâché
dans l’atmosphère en grande quantité au XXe siècle
y demeurera environ 100 ans, durant lesquels il réchauffera continûment
la planète. Il est établi que cette accumulation de CO2
provoquera une élévation de température au cours
des prochaines décennies, et ceci même si par enchantement
nous arrêtions instantanément de brûler des énergies
fossiles[6]. Le réchauffement climatique est donc malheureusement
devenu inévitable. Mais ce qui déterminera notre destin
(et notre survie), c’est son ampleur et sa rapidité, lesquelles
dépendront essentiellement de notre aptitude (ou inaptitude) à
réduire drastiquement les émissions de gaz à effet
de serre à l’échelle planétaire dans les deux
ou trois décennies à venir (période pendant laquelle
la consommation mondiale d’énergie devrait croître
de 60%!).
Figure 2
Source: Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution
du climat (GIEC), 2001
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution
du climat (GIEC), l’instance scientifique de référence
sur le changement climatique regroupant plusieurs centaines d’experts
scientifiques de plus de 100 pays, publie tous les cinq à six ans
un rapport complet faisant la synthèse des connaissances scientifiques
sur l’évolution du climat. Le dernier rapport a été
publié en 2001. Le prochain est prévu pour 2007. Le rapport
de 2001 prédisait une augmentation de la température moyenne
à la surface de la Terre comprise entre 1,4 °C et 5,8 °C
au cours du XXIe siècle (cf. figure 2), le bas de la fourchette
correspondant à des scénarios (trop?) optimistes selon lesquels
des mesures de grande envergure seraient prises à l’échelle
mondiale dans les prochaines années. Les prévisions du GIEC
s’arrêtent en 2100, mais le réchauffement se poursuivra
bien au-delà.
Une augmentation de température de quelques degrés peut
sembler inoffensive, mais elle correspondrait en réalité
à un changement climatique majeur. N’oublions pas qu’il
y a 21 000 ans, alors que les deux tiers de l’Europe et de l’Amérique
du Nord étaient recouverts de glaciers de deux à trois kilomètres
d’épaisseur et que le niveau des mers était 120 mètres
plus bas que de nos jours, la température moyenne de l’air
à la surface de la Terre n’était inférieure
que de 5 °C à celle d’aujourd’hui. Une augmentation
de la température moyenne de 5 °C au cours du XXIe siècle
- c’est-à-dire celle prédite par les experts du climat
- conduirait à un changement climatique de la même ampleur
que celui de la dernière période glaciaire à aujourd’hui...
un saut climatique suffisant pour rendre la majeure partie de la Terre
inhabitable!
Le tableau peint par le rapport de 2001 était déjà
alarmant. Depuis, la science du climat, dotée de moyens techniques
et financiers exceptionnels, a continué de progresser. Et, il faut
bien le dire, les résultats récents sont très inquiétants
car ils sous-entendent que l’ampleur et la rapidité du réchauffement
climatique, ainsi que le risque d’emballement irréversible
du climat, auraient été sous-estimés[7]. Les scientifiques
sont en effet convaincus qu’il existe des seuils, appelés
points de basculement (tipping points en anglais), au-delà desquels
le climat bascule de manière irréversible et rapide vers
un nouvel état très différent du précédent.
À la lumière des derniers résultats scientifiques
les experts du climat redoutent que certains de ces points de basculement
ne viennent d’être franchis ou ne le soient bientôt.
Les principaux domaines d’inquiétude sont les suivants:
1 - Récemment, les scientifiques ont découvert qu’un
phénomène appelé global dimming en anglais - une
diminution importante de l’ensoleillement due à l’interaction
de suies d’origine industrielle avec les nuages - tendant à
refroidir la Terre avait été largement sous-estimé.
De 1960 à 1990, ce phénomène refroidissant a probablement
masqué la moitié du réchauffement dû aux gaz
à effet de serre, conduisant les scientifiques à sérieusement
sous-estimer l’ampleur du réchauffement climatique. Ce phénomène
refroidissant tend à diminuer depuis 1990 parce que l’industrie
utilise des technologies moins polluantes et parce que les suies ont une
durée de vie dans l’atmosphère bien inférieure
à celle des gaz à effet de serre. Compte tenu de ce phénomène
de global dimming, les prédictions de réchauffement climatique
du GIEC de 2001 devront être revues à la hausse. Selon certaines
simulations informatiques, la température à la surface de
la Terre pourrait augmenter non pas de 5,8°C mais de 10°C au cours
du XXIe siècle[8, de quoi rendre la quasi-totalité de la
Terre inhabitable.
2 - Tous les modèles climatiques informatiques prédisent
que le réchauffement climatique touchera plus fortement les régions
polaires. Dans ces régions, l’élévation de
la température sera environ le double de l’augmentation moyenne
à la surface de la planète[6,9,10. Cette évolution
est malheureusement confirmée sur le terrain par un récent
rapport[11] de la NASA et du National Snow and Ice Data Center (NSIDC)
qui révèle que l’étendue de la banquise du
pôle Nord n’a jamais été aussi réduite
depuis plus d’un siècle. En septembre 2005, la superficie
de la banquise arctique était de 25 % inférieure à
celle qu’elle avait en moyenne dans les années 1980. L’étendue
de la fonte de la banquise est telle qu’un point de non-retour a
probablement été atteint[12]. En effet, les eaux sombres
non recouvertes de glace de l’Océan Arctique absorbent bien
davantage la lumière solaire que la très réfléchissante
banquise. Ainsi, plus la banquise se réduit, plus l’Océan
Arctique se réchauffe rapidement, accélérant ainsi
la fonte du reste de la banquise, et ainsi de suite... Ce cercle vicieux,
en langage scientifique une rétroaction positive, pourrait conduire
à une disparition totale de la banquise en été vers
2070, ce qui ne s’est plus produit depuis plus d’un million
d’années!
3 - L’océan Arctique n’est pas la seule région
froide qui inquiète les experts du climat. Des résultats
scientifiques récents[13,14] confirment que les régions
continentales proches de l’océan Arctique se réchauffent
également à un rythme accéléré. Ici
aussi des rétroactions positives sont à l’oeuvre.
Le réchauffement réduit l’étendue de la couverture
neigeuse, la remplaçant par une couverture végétale
qui absorbe davantage l’énergie solaire, amplifiant ainsi
le réchauffement local[14]. Le réchauffement continental
arctique à un autre effet pervers: en faisant fondre le permafrost
(le sol gelé en profondeur sur des centaines de mètres)
il libère d’énormes quantités de méthane
- un gaz à effet de serre 21 fois plus puissant que le CO2 - qui
y étaient piégées depuis des milliers d’années.
Des chercheurs ont ainsi récemment constaté qu’une
superficie d’un million de kilomètres carrés - soit
la superficie de la France et de l’Allemagne - de permafrost en
Sibérie occidentale a commencé à fondre pour la première
fois depuis sa formation il y a 11 000 ans à la fin de la dernière
période glaciaire[13].
4 - Les calottes polaires du Groenland et de la partie Ouest de l’Antarctique
sont également gravement menacées. Les climatologues nous
alertent depuis longtemps que la calotte de glace recouvrant tout le Groenland
est particulièrement vulnérable[10,15,16]. Mais ils ont
été très surpris et alarmés durant l’été
2004 quand ils ont constaté que les bords de cette calotte fondaient
dix fois plus vite que prévu[17]. Or la fonte des glaces situées
sur la terre ferme, à la différence de celles qui flottent
sur l’océan, a pour effet de faire monter le niveau des mers.
La fonte de toute la calotte groenlandaise entraînerait une élévation
du niveau des mers de 7 mètres, suffisante par exemple pour rendre
inhabitables toutes les villes côtières de la planète,
dont Londres, Venise, Calcutta, New York et Tokyo pour n’en citer
que quelques-unes. La fonte de l’intégralité de la
calotte glaciaire groenlandaise prendra vraisemblablement plusieurs siècles,
mais toutes les simulations informatiques s’accordent à prédire
que le processus de fonte, une fois engagé, ne pourra plus être
arrêté et qu’il continuera inéluctablement jusqu’à
la disparition quasi-totale de la calotte groenlandaise. Le réchauffement
de l’Océan Arctique voisin devrait aussi contribuer à
accélérer ce processus de fonte[10]. Quant à la calotte
glaciaire antarctique, si elle fondait entièrement, elle entraînerait
une élévation du niveau des mers de 60 mètres. Heureusement,
la majeure partie de cette calotte se trouve dans des régions où
la température reste largement en dessous de 0 °C toute l’année.
Dans ces régions une fonte de la calotte glaciaire est improbable
au cours du XXIe siècle. Par contre, la calotte glaciaire de la
partie Ouest de l’Antarctique inquiète les scientifiques:
au cours des 10 à 15 dernières années, elle s’est
déplacée vers la mer à un rythme accéléré
qui semble être dû au réchauffement climatique. La
fonte de la partie Ouest de la calotte glaciaire antarctique élèverait
le niveau des mers d’environ 5 mètres supplémentaires[18].
5 - Un autre grave point d’inquiétude concerne la forêt
amazonienne. Plusieurs résultats scientifiques[15,19,20] récents
amènent à penser que le réchauffement climatique
devrait s’accompagner d’une réduction suffisamment
importante des précipitations sur le bassin amazonien pour provoquer
une multiplication des feux de forêt et la transformation progressive
de la forêt amazonienne en savane ou en semi-désert à
l’horizon 2050. Si ce scénario devait devenir réalité,
une énorme quantité de carbone - l’équivalent
de tout le CO2 émis par l’humanité au cours du XXe
siècle - actuellement piégée sous forme de bois serait
libérée dans l’atmosphère sous forme de CO2.
Ce relâchement massif accélèrerait tragiquement le
réchauffement climatique.
6 - Les experts du climat redoutent également, en raison de l’élévation
globale de la température, que les puits de carbone naturels que
sont les océans et la végétation ne deviennent moins
efficaces, voire à terme qu’ils s’inversent et se transforment
en sources de carbone[15,21]. Contrairement à une croyance populaire
tenace, dans un monde plus chaud, la végétation absorbera
moins de CO2 que dans notre monde d’aujourd’hui[22]. Certains
scientifiques, à la lumière des augmentations anormalement
élevées et inexpliquées du taux de CO2 dans l’atmosphère
en 2002 et 2003, se demandent même si un tel phénomène
n’aurait pas déjà commencé[23].
7 - Et comme si tout cela ne suffisait pas, il existe une menace encore
plus grave pour le climat de la planète. Elle se trouve au fond
des océans où des quantités colossales de méthane
- estimées à 10 000 milliards de tonnes de carbone, soit
l’équivalent de plus du double des réserves mondiales
de charbon, pétrole et gaz naturel - sont stockées sous
forme d’hydrates de méthane. Le méthane est un gaz
qui provoque un effet de serre 21 fois supérieur à celui
du CO2. Ces hydrates de méthane, qui ont l’aspect de la neige,
ne restent stables que sous de fortes pressions et à basses températures.
Une élévation de la température des couches profondes
des océans de plusieurs degrés suffirait à les déstabiliser,
déclenchant une spirale infernale dans laquelle le méthane
libéré renforcerait l’effet de serre, ce qui libèrerait
davantage de méthane et ainsi de suite[13,15]. Une telle spirale
rendrait la terre quasi inhabitable.
Improbable, pensez-vous! Pas tant que ça. Les scientifiques savent
qu’un tel événement s’est déjà
produit au moins à deux reprises, il y a 250 millions et 55 millions
d’années, causant respectivement l’extinction de 95
% et 90 % des espèces vivantes. À titre de comparaison,
la météorite géante (ou la super-éruption
volcanique selon une autre théorie) qui a provoqué la disparition
des dinosaures il y a 65 millions d’années a été
relativement bénigne puisqu’elle n’a causé l’extinction
que de 60 % des espèces.
Le Professeur Sir David King, premier conseiller scientifique du gouvernement
britannique et expert du climat, faisait allusion au réchauffement
climatique catastrophique d’il y a 55 millions d’années
lorsqu’il déclarait devant la Chambre des Lords, le 1er mars
2004, que «l’Antarctique était le meilleur endroit
où vivre à l’époque. Il y faisait relativement
chaud par rapport à la Terre d’aujourd’hui, mais le
reste du monde était inhabitable » (Original: «the
Antarctic was the best place to be at that time. That was relatively hot
compared to most of the world today, but the rest of the world was uninhabitable»[5]).
Il a aussi souligné, le 27 avril 2004, que les conditions qui prévalaient
alors - un niveau de CO2 de 1000 ppm et la disparition de la glace de
la surface de la Terre - pourraient exister à nouveau en 2100[25].
Vous vous dites peut-être qu’au moins le réchauffement
des couches profondes de l’océan devrait prendre très
longtemps! Hélas, pas nécessairement. En quelques décennies
le réchauffement climatique pourrait changer la circulation océanique,
réchauffer certaines couches profondes de l’océan
et déstabiliser des hydrates de méthane. L’un des
courants océaniques les plus vulnérables est le Gulf Stream
dans l’Atlantique Nord. Or, justement, des mesures scientifiques
récentes (encore à confirmer) montrent que le Gulf Stream
pourrait avoir perdu 30% de son intensité au cours des 50 dernières
années[26]. Même si ces mesures ne sont pas très fiables
car trop limitées en nombre, c’est un bien mauvais signe.
D’autant plus que d’autres résultats récents
révèlent que le dernier dégazage massif d’hydrates
de méthane il y a 55 millions d’années (voir ci-dessus)
a été déclenché par un inversion soudaine
et complète de la circulation océanique, elle-même
causée par un réchauffement climatique par gaz à
effet de serre d’origine volcanique[27]. Malheureusement pour nous,
la quantité de gaz à effet de serre d’origine humaine
émise depuis deux siècles se rapproche dangereusement de
celle qui déclencha ce réchauffement climatique cataclysmique
il y a 55 millions d’années[27]. Espérons que les
mêmes causes n’auront pas les mêmes effets...
LA PRISE DE CONSCIENCE DES DIRIGEANTS MONDIAUX
La plupart des dirigeants mondiaux, alertés par leurs conseillers
scientifiques, semblent avoir pris conscience du fait que le réchauffement
climatique représente une menace sans précédent pour
l’humanité et qu’il y a urgence à agir.
Il y a, bien sûr, une exception notable: l’administration
Bush continue à nier l’origine anthropique du réchauffement
climatique, alors même que l’Académie des sciences
américaine et tous les comités scientifiques américains
et mondiaux les plus réputés affirment unanimement que le
doute n’est plus permis[1,2].
L’Europe et le Japon sont en pointe dans la lutte contre le réchauffement
climatique. Les dirigeants européens ont déjà entrepris
des efforts méritoires pour sensibiliser leur opinion publique,
sans le soutien de laquelle aucune mesure d’envergure ne sera possible[28].
Car il est clair maintenant qu’il faudra aller bien au-delà
des engagements de Kyoto pour ralentir le réchauffement climatique
et pour éviter qu’il ne s’emballe[5,19]. Le premier
ministre britannique Tony Blair a placé le réchauffement
climatique au centre des discussions du G8 en juillet 2005. Pour convaincre
ses partenaires il s’est appuyé sur un récent rapport[19]
de l’International Climate Change Taskforce composée de scientifiques
réputés et de politiciens de premier plan, et fondée
à l’initiative de trois prestigieux think tanks américain,
britannique et australien. Ce rapport préconise que des mesures
d’envergure soient prises pour éviter à tout prix
que l’élévation de température depuis l’ère
préindustrielle ne dépasse 2°C (soit 1,2°C de plus
que les températures actuelles), niveau au-delà duquel les
conséquences du réchauffement climatique deviendraient catastrophiques.
Afin d’atteindre cet objectif, les pays développés
devront réduire leurs émissions de gaz à effet de
serre d’au moins 60% dans les toutes prochaines décennies
et les pays émergents devront aussi réduire leurs émissions
dans des proportions moindres mais quand même très ambitieuses[19].
Il est d’ailleurs probable que ces chiffres sous-estiment l’effort
nécessaire. D’autres sources considèrent qu’il
faudrait réduire les émissions humaines à l’échelle
planétaire de 80% d’ici 2030 pour éviter un désastre
écologique dû au réchauffement climatique[29]. Le
rapport insiste sur l’effort considérable de recherche et
de développement devant être engagé dans les domaines
de la production d’énergie propre - c’est-à-dire
émettant peu ou pas de CO2 - et de la réduction de la consommation
énergétique, et exhorte à un doublement des investissements
des pays du G8 dans ces domaines d’ici 2010.
Les dirigeants politiques ne sont pas les seuls à avoir compris
l’importance du réchauffement climatique. De plus en plus
d’entreprises, d’institutions financières et d’investisseurs
sont en train de prendre conscience du fait que le réchauffement
climatique et la lutte contre celui-ci vont imposer à nos sociétés
de s’adapter rapidement et qu’il convient d’anticiper
ces changements[29,30].
Finalement, ce sont les citoyens qui par manque d’information ont
le moins réalisé l’ampleur de la menace que représente
le réchauffement climatique. Les efforts systématiques de
désinformation du lobby pétrolier, tout particulièrement
ceux bien documentés de la société Exxon Mobil, auprès
des médias y sont certainement pour beaucoup[3,4]. Pour l’anecdote,
selon le magazine The Economist, le PDG d’ExxonMobil qui vient juste
de prendre sa retraite, Lee Raymond, affirmait ouvertement, il y a seulement
quelques années, que le réchauffement climatique n’était
qu’un gigantesque canular (en anglais: «global warming is
a giant hoax »)[31]. Ce n’est que tout récemment qu’ExxonMobil
a enfin admis la réalité du réchauffement climatique31.
Or, sans une prise de conscience majeure dans l’opinion publique,
rien ne se fera. Car les mesures à prendre pour lutter contre le
réchauffement climatique auront bien sûr un coût (même
si ne rien faire coûtera à terme infiniment plus cher) et
elle réduiront notre qualité de vie. Aucun chef de gouvernement
ne prendra de telles mesures sans s’être assuré du
soutien d’une partie de l’opinion. Pour le moment, ce thème
étant complètement absent de toute élection politique,
nous en sommes hélas encore bien loin...
Toutefois, l’on peut raisonnablement espérer que l’accumulation
de preuves scientifiques et la fréquence accrue d’événements
météorologiques extrêmes (vagues de chaleur, ouragans,
sécheresses) finiront par convaincre l’opinion publique de
l’urgence à agir. Espérons seulement qu’alors
il ne sera pas trop tard...
CONCLUSION
Alors, est-il trop tard pour agir?
James Lovelock[10], le pionnier de la climatologie moderne et le premier
à comprendre dès les années 1970 comment la biosphère
(qu’il nomma Gaia) autorégule le climat planétaire,
compare le réchauffement climatique actuel à la situation
d’une maison en bois dans laquelle on aurait fait un feu pour se
réchauffer, sans remarquer que le feu a commencé à
se propager au mobilier. Quand cela se produit, il reste très peu
de temps pour éteindre l’incendie avant qu’il ne se
propage à toute la maison. Le réchauffement climatique,
comme un feu, est en train d’accélérer et il ne reste
que très peu de temps pour agir. Peut-être est-il déjà
trop tard, mais nous ne pouvons en avoir la certitude.
En tant que citoyen responsable, nous devrions nous demander quel regard
les générations futures jetteront sur nous. Si nous n’agissons
pas rapidement et de manière décisive pour enrayer le réchauffement
climatique, il est certain qu’elles nous maudiront. Les générations
précédentes sont tout aussi responsables que nous du réchauffement
climatique, mais on ne peut guère le leur reprocher, elles ignoraient
l’existence du phénomène. Les prochaines générations
auront sûrement la volonté d’agir, mais les scientifiques
nous disent qu’alors il sera trop tard. La responsabilité
historique qui nous incombe est écrasante. Si nous n’agissons
pas, les générations futures diront de nous: «Ils
savaient. Et ils n’ont rien fait!
Source http://climat.canalblog.com/ et http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=7304
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