Le Conflit israélo palestinien

Article d'Antoine Waechter, paru dans "La lettre des écologistes", du Mouvement Ecologiste Indépendant (MEI), juin 2005. http://www.mei-fr.org

 

Le drame palestinien et les Écologistes


Les Écologistes n'ont jamais été indifférents au drame palestinien. Les premières prises de position sont contemporaines de la naissance des Verts, en 1984. Dès 1988, en pleine intifada, Antoine WAECHTER s'est rendu en Palestine, où il a rencontré les représentants des partis israéliens et palestiniens. Une délégation, composée de Jean-Louis VIDAL, Guy CAMBOT et Antoine WAECHTER, a rencontré Yasser ARAFAT à Paris, en 1989. Témoignages de l'impact affectif du conflit israélo-palestinien, celui-ci a suscité des prises de position parfois exacerbées, y compris de la part des députés écologistes au Parlement Européen. En retour, les relations avec les représentants de la communauté juive ont été émaillées de malentendus, bien que les échanges avec le Comité Représentatif des Institutions juives de France (CRIF) aient été fréquents au cours des années 1990. Les Écologistes ont été régulièrement agressés par les partisans d'Israël.

Les Écologistes se sentent proches des Palestiniens parce qu'ils ressentent, comme eux, la brutalité d'une civilisation qui ne tient aucun compte du lien qui unit la personne au lieu qui l'a vu naître. Les Amérindiens, les aborigènes sud-américains, australiens et calédoniens bénéficient de la même solidarité de coeur.

 

La naissance d'Israël

Le concept national juif, exprimé par Leo PINSKER vers 1880 puis par Théodore HERZL en 1897, est inspiré par la notion biblique de peuple élu, par les persécutions dont sont victimes les Juifs depuis des siècles et par l'esprit colonial de la fin du XlXe siècle.

Le retour du peuple d'Israël sur la terre promise est le mythe fondateur de la création de l'État juif en Palestine, un État fondé non sur le droit du sol, mais sur l'appartenance à une communauté religieuse.

L'idée même de créer de toutes pièces un foyer national sur un territoire déjà occupé participe du mouvement colonial de l'époque, de la puissante émigration européenne vers l'Amérique et l'Afrique et de la croyance en une civilisation supérieure porteuse de progrès.

Le congrès juif mondial, réuni à Bâle en août 1897, crée l'organisation sioniste mondiale suivie, en 1899, par la création de la banque coloniale juive. À partir de cette date, les achats de terres vont se multiplier en Palestine, notamment auprès de grands propriétaires turcs. Les fondations de Tel Aviv sont posées en 1909. En 1914, les surfaces acquises atteignent 420 000 hectares. Cette politique foncière suscite les premiers affrontements avec les Palestiniens.

En 1916, la Palestine passe sous le contrôle des Anglais. En 1917, le gouvernement britannique « envisage favorablement la création d'un foyer national juif » (déclaration BALFOUR). En 1921, les affrontements entre Juifs et Arabes ont déjà fait une centaine de morts. Des milices juives se constituent. L'armée britannique protège les colons juifs.

Le 17 mai 1939, les Anglais proposent la création d'un État indépendant dirigé par les Juifs et par les Arabes : les premiers refusent, les seconds acceptent. À l'issue de la seconde guerre mondiale, le Moyen-Orient passe sous la protection des Américains.

Le 29 novembre 1947, sous l'influence des États-Unis et de l'Union soviétique, les Nations-Unies recommandent le partage de la Palestine entre un territoire juif et un territoire arabe (résolution 181). Le 9 avril 1948, des groupes terroristes juifs massacrent les 254 habitants du village de Deir Yassine, provoquant le début de l'exode palestinien. L'État d'Israël est créé dans la foulée et reconnu dans l'heure qui suit par TRUMAN et GROMYKO. Les pays arabes entrent en guerre. Le comte BERNADOTTE, médiateur de l'ONU, est assassiné par des extrémistes juifs le 17 septembre 1948.

Au fil des guerres qui vont suivre, l'État d'Israël étend son territoire. La dispersion de près de 1 250 000 réfugiés palestiniens dans les pays voisins de la Palestine déstabilise l'ensemble du Moyen-Orient (Jordanie, Liban, Egypte ...).

 

L'impasse écologique

La Palestine a la dimension d'une grande région française. Une partie de son territoire est désertique. En 1880, elle abrite 250 000 personnes, dont 20 000 Juifs. Les Juifs sont 554 000 en 1944 : ils représentent alors 31% de la population totale.

Aujourd'hui, l'État d'Israël compte 6,5 millions d'habitants. Les territoires palestiniens réunissent 3 millions de personnes sur 6 215 kilomètres carrés, soit une densité de peuplement de 483 habitants au km2. Dans la bande de Gaza, la densité est proche de 3 000 habitants au km2. La viabilité de ces peuplements dépendent de l'extérieur, notamment des aides apportées par les diasporas juives et palestiniennes ainsi que par la communauté internationale. Ces territoires sont incapables d'assurer leur autosuffisance alimentaire. Les ressources en eau douce sont insuffisantes.

L'espace fertile étant compté, la lutte pour le territoire est cruciale. Elle se traduit par la colonisation juive des territoires palestiniens. Cette colonisation est à l'origine de l'échec de tous les plans de paix élaborés à ce jour.

Les deux communautés sont engagées dans une course démographique, par la natalité chez les Palestiniens, par l'immigration chez les Israéliens, l'objectif étant la prééminence par le nombre. De plus, 1,2 million de réfugiés palestiniens attendent de rentrer chez eux. Aucune solution durable n'est envisageable sans un désarmement démographique.

 

Résolution politique

D'un point de vue écologique, ni l'État israélien, ni l'État palestinien ne sont viables. La situation actuelle prévaut dans un contexte géopolitique dominé par les États-Unis associé à un contexte économique permettant d'importants transferts de fonds en direction des deux communautés. Ces contextes sont appelés à évoluer rapidement suite à l'affirmation de la Chine comme puissance mondiale et aux mutations liées à la fin du pétrole.

C'est pourquoi, à terme, la solution est un État fédérant les deux communautés, avec une seule justice, une seule école, une seule armée. Cet État sera nécessairement laïc, garantissant à chaque communauté le libre exercice de sa religion, et démocratique (une personne égale une voix). Une union plus large, réunissant l'État israélo-palestinien, la Jordanie, le Liban et la Syrie, voire au-delà, pourrait assurer une gestion globale de l'eau, mais il s'agit, pour l'heure, d'une perspective utopique.

 

Plusieurs préalables et des étapes intermédiaires sont nécessaires :


• l'affirmation du droit international, face au vol des terres palestiniennes, à la violation des droits fondamentaux de la personne humaine et au terrorisme;

• le désarmement démographique, c'est-à-dire le gel de l'immigration juive et le freinage de la démographie palestinienne ; l'aide internationale devra favoriser l'insertion économique et sociale des émigrés palestiniens dans les pays voisins afin de décourager provisoirement leur retour au pays;

• le dédommagement des Palestiniens expropriés par la colonisation juive en Cisjordanie.

 

Attitude non violente

La société israélienne est traversée par des courants très divers, des courants pacifistes qui militent pour la main tendue aux Palestiniens, des courants progressistes plus timides, mais aussi une extrême droite dure. De la même manière, la société palestinienne est travaillée par des courants favorables à la recherche d'une solution négociée et d'autres qui exploitent le désespoir pour entretenir la violence meurtrière.

Il nous appartient de soutenir les hommes de bonne volonté des deux camps, de condamner avec autant de force la violation du droit par l'État d'Israël que le terrorisme des groupes extrémistes palestiniens. Ce terrorisme est une impasse qui s'apparente à un suicide.

Il nous appartient de dire que la concurrence démographique des deux communautés conduit l'une et l'autre à une sévère crise de subsistance et rend impossible toute solution durable.

Il nous appartient enfin de condamner les actes antisémites sur notre territoire, pour des raisons éthiques évidentes, mais aussi parce qu'ils alimentent l'émigration vers Israël et renforcent la politique des faucons.

 

Antoine WAECHTER